vendredi 29 août 2014

Les peintures d'Alexandra Duprez à la Galerie Aleph, par Valérie Belmokhtar (english and french versions)


 Après sa visite de l'exposition Alexandra Duprez / Jean-Pierre Le Bars à la Galerie Aleph à Quimper (du 19 juillet au 20 septembre 2014), l'artiste française Valérie Belmokhtar a écrit ce texte qui nous fait pénétrer dans l'univers d'Alexandra Duprez :
 
Un endroit serein, calme, un après-midi d'été. Un jeune homme vous reçoit avec un grand sourire et vous conduit vers les toiles. Dès la montée de l'escalier, une grande peinture nous accueille également à sa façon et nous accompagne dans notre ascension vers le monde d'Alexandra Duprez. Une fois dans l'exposition, les bleus, les beiges, les rouges, les noirs et les blancs commencent à chanter à votre oreille. Cela chante mais en silence. Une peinture aux couleurs presque sourdes, des murmures s'en échappent tout de même.

Nul besoin d'être initié, la peinture d'Alexandra Duprez parle le langage universel, celui qui vient de la terre tout simplement, utilisant signes, rythmes et couleurs.

Je vois immédiatement des ruissellements, des étoiles (ma toile préférée sera dès le début la robe avec les étoiles justement). La nuit n'est pas loin dans ce monde là, à moins qu'il ne s'agisse d'un cosmos avec son ordre bien à lui, et avec son langage fait de mots-images mis en peinture.
J'entends chuchoter en regardant une toile remplie de minuscules petits signes. Cette musique m'est familière, je comprends son langage. Plus tard je croise une peinture aux blancs beiges épais, ces matières sont époustouflantes de beauté, des pigments mats et pas l'once d'une brillance. On pense aux fresques, aux peintures primitives, aux traces des premiers hommes, mais aussi aux couvertures chaudes dont on se recouvre en hiver, les textures sont enveloppantes, voire rassurantes.

Les formats sont généreux et vous font entrer tout entier dans les peintures. Vous êtes presque un élément de ce qui se passe devant vous. Ces bleus font rêver. Des yeux vous regardent, des larmes coulent, il se joue comme une pièce de théâtre, une tragédie dont les dialogues s'adressent à votre âme et à votre mémoire enfouie, celle qui est séculaire.

La pluie des coulures de peinture ruisselle, vous êtes mouillés aussi d'une certaine manière et les animaux-signes vous appellent, vous êtes eux, ils sont vous, vous êtes dans eux.

"Les pas dans la neige" de Debussy me sont venus à l'esprit tandis que je regardais ces peintures. J'ai été prise dans ces cercles et dans ces couleurs feutrées, couleurs absorbées par des fonds cartons ou des supports de toiles épaisses. Des petits points comme des notes de piano en sourdine, des cascades de petites taches, de petites gouttes d'eau qui tombent formant un rideau de perles brutes.

Nul doute qu'Alexandra Duprez est une peintre magicienne car elle peint un monde dans plusieurs dimensions bien au delà du simple visible.

Valérie Belmokhtar, juillet 2014.



***

After her visit of the exhibition Alexandra Duprez / Jean-Pierre Le Bars at the Gallery Aleph in Quimper - France (19th july - 20th september 2014), french artist Valérie Belmokhtar wrote this text which allows us to enter into the realm of Alexandra Duprez:

A serene, quiet place, during a summer afternoon. A young man welcomes you with a wide smile and leads you towards the canvases. From the staircase, a big painting greets you too its way and takes you along within the ascent to the Alexandra Duprez’s realm. Once you are into the exhibition, the blues, beiges, reds, blacks, whites begin to sing for your ear. It sings, but it sings with silence. A painting with almost deaden colors nevertheless releases murmurs. 

No need to have an initiation, the paintings of Alexandra talk the universal language, which simply comes from the soil, using signs, rhythms and colors.

I immediately see runoffs, stars (my favorite painting since the beginning is the one of the dress with stars, precisely). In this world the night remains close, or maybe it is a whole cosmos, with its own order and with its language made of words-images set into paintings. I hear something whispering while looking at a painting filled with tiny signs. This music sounds familiar to me, I understand its language. Later I come across a painting showing thick whites and beiges, this matter is amazingly beautiful : matt pigments and no hint of a gloss. We think about frescoes, about primitive paintings, about the traces of the first human beings, but we think as well about the warm blankets we enjoy covering ourselves during the winter, the textures are enveloping, and even reassuring.

The formats are generous and allow you to wholly enter into the paintings. And you are almost an element of what happens before you. Those blues create dreams. Eyes are watching you, tears are flowing, it is like a theatre-play, a tragedy with dialogs addressing your soul and your buried memory, secular memory.

The dripping of rainy painting streams, you are wet a certain way as well, and the animal-signs call you, you are them, they are you, you are into them.

Les pas dans la neige (Footsteps in the snow) by Debussy came in my mind while looking at those paintings. I was taken into those circles and into those hushed colors, absorbed by cardboard bases or medium made of thick canvasses. Small dots like toned down piano notes, cascades of little stains, tiny drops of water forming a curtain of raw beads.

No doubt that Alexandra Duprez is a magician painter because she paints a world into several dimensions, far beyond the mere visible.

Valérie Belmokhtar, juillet 2014.